Introduction
La loi n° 2024-364 du 22 avril 2024 a profondément modifié les règles d'acquisition des congés payés pour les salariés en arrêt maladie. Cette réforme, entrée en vigueur le 24 avril 2024, met enfin le droit français en conformité avec le droit européen. Désormais, tout arrêt de travail, qu'il soit d'origine professionnelle ou non, ouvre droit à des congés payés. Cette évolution majeure impacte directement la gestion de la paie et des ressources humaines dans les TPE et PME.
Ce qui change fondamentalement avec la loi du 22 avril 2024
Avant cette réforme, les salariés en arrêt maladie non professionnelle n'acquéraient aucun droit à congés payés. Cette situation, contraire au droit de l'Union européenne, a été remise en cause par les arrêts de la Cour de cassation du 13 septembre 2023. Le législateur a donc dû intervenir pour clarifier les nouvelles règles applicables.
Le nouveau rythme d'acquisition des congés
La distinction entre maladie professionnelle et non professionnelle reste pertinente pour déterminer le nombre de jours acquis mensuellement. Le tableau suivant synthétise les droits applicables selon la nature de l'arrêt.
- Travail effectif : 2,5 jours ouvrables par mois, soit 30 jours maximum par an
- Arrêt maladie non professionnelle : 2 jours ouvrables par mois, soit 24 jours maximum par an
- Arrêt pour accident du travail ou maladie professionnelle : 2,5 jours ouvrables par mois, sans limitation de durée
Un exemple concret de calcul
Prenons le cas d'un salarié absent pour maladie non professionnelle pendant 4 mois au cours de la période de référence. Son calcul s'effectue de la manière suivante : 4 mois d'arrêt multipliés par 2 jours, auxquels s'ajoutent 8 mois de travail effectif multipliés par 2,5 jours. Le total s'élève donc à 28 jours ouvrables de congés payés pour cette période de référence.
La gestion du report des congés non pris
Lorsqu'un salarié se trouve dans l'impossibilité de prendre ses congés payés en raison d'une maladie ou d'un accident, il bénéficie désormais d'un droit au report. Cette disposition constitue une avancée majeure pour les salariés confrontés à des arrêts de longue durée.
Le délai de report de 15 mois
La période de report est fixée à 15 mois minimum. Ce délai commence à courir à partir du moment où l'employeur informe le salarié de ses droits à congés après sa reprise du travail. Tant que cette information n'est pas délivrée, le délai ne démarre pas. Pour accompagner les entreprises dans la mise en œuvre de ces nouvelles obligations, MontaiguRH propose un accompagnement personnalisé en gestion des ressources humaines.
Cas particulier des arrêts de longue durée
Pour les salariés en arrêt depuis au moins un an à la fin de la période d'acquisition des congés, la période de report de 15 mois débute automatiquement à cette date, sans attendre la reprise du travail. Si le salarié reprend avant l'expiration des 15 mois, le délai est suspendu jusqu'à réception de l'information de l'employeur, puis reprend pour la durée restante.
"La réforme des congés payés de 2024 représente un tournant historique dans le droit du travail français, alignant enfin notre législation sur les standards européens de protection des salariés."
Les nouvelles obligations de l'employeur
La loi impose désormais aux employeurs une obligation d'information renforcée envers les salariés revenant d'un arrêt de travail. Cette obligation est essentielle pour garantir l'effectivité du droit aux congés payés.
Le contenu de l'information obligatoire
Dans le mois suivant la reprise du travail, l'employeur doit communiquer au salarié deux informations essentielles. D'une part, le nombre exact de jours de congés dont il dispose. D'autre part, la date limite jusqu'à laquelle ces congés peuvent être pris. Cette communication doit être effectuée par tout moyen conférant date certaine, comme une mention sur le bulletin de paie.
Les conséquences du défaut d'information
Le non-respect de cette obligation n'est pas sans conséquence pour l'employeur. En l'absence d'information, la période de report de 15 mois ne commence pas à courir. Le salarié conserve donc ses droits tant qu'il n'a pas été dûment informé. Cette situation peut engendrer un cumul important de jours de congés à gérer.
Le calcul de l'indemnité de congés payés adaptée
La réforme a également modifié les règles de calcul de l'indemnité de congés payés pour éviter toute distorsion entre les salariés ayant travaillé et ceux ayant été en arrêt maladie.
La règle des 80 % pour les périodes de maladie
Pour le calcul de l'indemnité selon la règle du dixième, la rémunération correspondant aux périodes d'absence pour maladie non professionnelle est prise en compte à hauteur de 80 % seulement, contre 100 % pour les périodes de travail effectif. Cette mesure vise à maintenir une équité entre les salariés présents et absents.
La comparaison des deux méthodes de calcul
L'employeur doit toujours comparer les deux méthodes de calcul de l'indemnité : la règle du dixième et le maintien de salaire. La méthode la plus favorable au salarié doit être retenue. Cette obligation demeure inchangée, mais son application nécessite désormais la gestion de deux compteurs distincts de congés payés.
La rétroactivité de la loi et ses implications
La réforme s'applique rétroactivement aux arrêts de travail survenus depuis le 1er décembre 2009. Cette rétroactivité offre aux salariés la possibilité de réclamer des congés payés non attribués dans le passé.
Les conditions de la régularisation
Les salariés dont le contrat de travail est toujours en cours disposent d'un délai de forclusion de deux ans à compter du 24 avril 2024 pour faire valoir leurs droits. Toute action doit donc être introduite avant le 24 avril 2026. Pour les salariés ayant quitté l'entreprise, le délai de prescription de trois ans à compter de la rupture du contrat s'applique.
Le plafonnement des droits rétroactifs
Pour la période antérieure au 24 avril 2024, les congés supplémentaires acquis ne peuvent excéder le nombre de jours permettant d'atteindre 24 jours ouvrables par période de référence. Ce plafond prend en compte les jours déjà acquis pour éviter tout cumul excessif.
Conclusion
La loi du 22 avril 2024 transforme significativement la gestion des congés payés dans les entreprises françaises. Les employeurs doivent désormais intégrer ces nouvelles règles dans leurs pratiques quotidiennes, depuis l'acquisition des droits jusqu'au calcul de l'indemnité, en passant par l'information obligatoire des salariés. Une mise à jour des logiciels de paie et une vigilance accrue dans le suivi des compteurs de congés s'imposent pour garantir la conformité avec cette réforme majeure du droit du travail.